A mon moi révolté qui crie à l’injustice. Mon moi qui veut que tout aille plus vite, plus loin, plus fort, plus intense. A mon moi qui juge la connerie de l’humanité en ayant envie de casser des bouches quand il voit des gens balancer leur masque par terre. A mon moi qui est déjà là-bas et qui ne comprend pas que les autres sont encore ici. A mon moi en colère contre ceux qui m’ont abandonnée, blessée au plus profond de moi, ceux qui n’ont pas conscience d’avoir eu un effet aussi destructeur et dévastateur dans ma vie, en colère contre ceux qui reproduisent ces schémas dans la vie d’autres personnes. A ce moi révolté contre les mots qu’on n’entend pas, contre ce silence qu’on impose, révolté contre cette norme sociétale qui parfois manque de sens et de cohérence, contre cette normalité qui nous enferme dans des cases et peine à nous laisser en sortir, qui nous empêche souvent d’être nous. A ce moi en colère contre moi de m’être laissée faire, de ne pas avoir su dire non quand il le fallait, ou de ne pas l’avoir dit assez fort, de m’être laissée marcher dessus, de m’être écrasée en m’empêchant d’exister, d’avoir voulu plaire à tout prix en niant qui j’étais. A ce moi qui m’en veut de m’être fait autant de mal, d’avoir poussé aussi loin les limites, à ce moi révolté qu’on ne l’ait pas laissé s’exprimer, qu’on l’ait réduit au silence, rejeté, enfoui loin. A ce moi trop longtemps enfermé, pourtant si fort, si puissant, tellement beau dans sa volonté de se faire entendre, ce moi qui me complète, qui me fait être une et entière. Ce moi passionné, spontané, parfois sans filtre qu’on a trop souvent fait taire, que j’ai trop souvent fait taire, dans la crainte du jugement de l’autre. Ce moi qui vit les choses pleinement et prend la vie à bras le corps. Ce moi qui pourtant me porte et me rend forte. Ce moi qui je ne veux plus laisser de côté, jamais. Ce moi mis à l’écart, blessé, meurtri, encore méfiant, qu’il me faudra apprivoiser. S’il te plaît, ne me juge pas trop sévèrement, sois patient avec moi, laisse-moi apprendre à te connaître et à t’aimer. Et de tout mon cœur, je te demande pardon.
A ce toi. A ce toi si doux et bienveillant, si tolérant et si aimant. Ce toi si fort et si fragile à la fois. Ce toi qui a tenté de te construire, malgré les épreuves que tu as traversées, avec les maigres outils dont tu disposais. Ce toi qui avait tant besoin de légitimité, tant besoin d’exister, tant besoin d’être aimé. Ce toi qui a tellement souffert d’être rejeté et abandonné qu’il a préféré me laisser dans un coin si sombre, qu’il ne me verrait plus. Ce toi qui avait honte d’être toi, avec moi. Ce toi qui aspire à la paix et à la sérénité, au calme et à l’apaisement. Ce toi qui pense que tout est de sa faute et qui culpabilise sans cesse, ce toi qui se met une pression constante pour faire comme il faut, pour faire ce que tu penses que l’on attend de toi. Ce toi, terrifié à l’idée d’être toi avec moi, authentique, unique et magnifique. Sache que toi et moi, nous sommes complémentaires. Je voudrais te dire que tu n’as pas à avoir peur, que tu peux être fière de qui tu es. Que tu n’es pas seule. Toi et moi, ensemble, on est fortes et on peut avancer, mais dans la main. A ce toi qui tremble, je voudrais dire que si j’ai été en colère, je ne le suis plus, plus contre toi. Que j’ai compris pour quoi tu as fait tout ça et que je ne te jugerai pas. Je nous sais forte et courageuse, volontaire et tenace. Je ne t’en veux pas, je ne t’en veux plus. Tu as fait ce que tu pouvais, comme tu pouvais. Et je suis fière de nous. Du chemin qu’on a parcouru. Confiante pour aller de l’avant avec toi. Oui, il faudra du temps pour s’accorder, trouver nos marques et se laisser être, librement et sans barrières. Sache que tu n’es pas seule, jamais. Que si tu tombes, tu te relèveras, toujours. Que je suis là, avec toi. Que du plus profond de mon être, je t’aime. Et qu’avec tout mon cœur, je te pardonne.