A ma sœur, Elisabeth, cette personnalité magnifique, mon pilier du quotidien.

Le dernier grain de sable tomba lourdement, de son poids écrasant, et vint s’échouer sur le monticule formé dans le réceptacle. Il résonnait comme l’écho de la hache sur le billot, semblable au sifflement d’une lame de guillotine, tel le bruit sourd du tabouret tombant sous les pieds des pendus. Il était trop tard. Eleanor ferma les yeux, tandis que ses épaules s’affaissaient. Une unique larme coula sur sa joue.

***

Mais dans quoi t’es-tu encore fourrée ma vieille ?

Le soleil reflétait sur le diamant dans un scintillement éclatant. Eleanor dut détourner le regard, qu’elle posa alors, songeuse, sur le ruisseau qui s’écoulait à ses pieds. Le dos appuyé contre un chêne centenaire, la jeune femme laissait distraitement ses orteils dénudés goûter l’eau fraîche et claire. Machinalement, elle tritura la bague à son annulaire gauche. Pourquoi se laissait-elle embarquer dans ce qu’elle abhorrait par-dessus tout ? Toute sa vie, elle avait puisé la force qui la caractérisait dans cette affirmation de qui elle était. On la disait têtue, étrange, ingérable, mais elle se savait autonome, déterminée et audacieuse. Libre. Peut-être parce qu’elle était la benjamine d’une fratrie de cinq enfants. Depuis l’âge tendre, elle s’affranchissait des codes que la société tentait de lui imposer, sans se soucier des regards réprobateurs qui se posaient sur elle. Son père lui vouait un amour sans limite et regardait cela d’un œil amusé, quand sa mère désespérait de pouvoir un jour l’éduquer comme une jeune fille de bonne famille.

Cependant, elle avait dû se résoudre. Le jour fatidique était arrivé. Eleanor allait se marier. Se marier. Grand Dieu. Elle avait tout tenté, pour retarder au maximum cette décision qui tombait pour elle comme une sentence d’emprisonnement. Pourtant, l’adulte en elle savait qu’elle n’avait pas le choix, parce qu’elle n’était pas seule dans l’équation. Son père, l’année précédente, avait investi une grosse partie de leur fortune dans des caravelles, convaincu que la découverte du nouveau monde ne pouvait qu’être source d’enrichissement. Malheureusement, les navires avaient sombré. Pris dans une terrible tempête. N’était resté qu’un canot de survivants qui avaient pu rejoindre la côte dans un état presque fatidique. Ils étaient donc proches de la ruine. Seul un mariage avantageux pouvait sauver la famille, l’argent issu des unions de ses frères et sœurs étant plus ou moins engagé dans d’autres placements. Alors pour son père, Eleanor était prête à tout. Même à vivre une vie complète d’abnégation. Mais il y avait une chose à laquelle elle n’était pas prête à renoncer.

Le regard perdu dans le vague, la rousse secoua la tête, et avisa le soleil qui commençait à descendre à l’horizon. Il était temps. Elle remit ses chausses, sauta sur ses pieds et enfourcha son cheval, qui broutait tranquillement non loin de là. Un sourire amusé se dessina sur son visage, tandis que le regard outré des domestiques du domaine lui revenait en mémoire. Elle montait comme un homme, faisant fi de toutes les conventions. Elle n’avait jamais trouvé ça pratique, les robes, avec toutes leurs couches, pour galoper. Alors au pire, elle mettait des chausses sous sa robe afin de pouvoir la remonter à sa convenance sans susciter les soupirs prudes de ses congénères, au mieux elle revêtait une tenue masculine et tant pis pour les haussements de sourcils et sourires sarcastiques. Se penchant aux oreilles de son canasson, Eleanor lui murmura :

– Allez mon vieux, on n’a plus le choix là.

Elle appréhendait. Mais c’était ça ou… non. Non. Il fallait que ce soit ça. Elle dirigea sa monture vers la forêt, tournant le dos au domaine. Puis elle donna quelques coups de talons et partit sans plus hésitation vers les bois denses qui se dessinaient devant elle. Alors qu’elle se laissait porter par le rythme soutenu de son compagnon d’aventure, elle repensa nostalgique à la petite fille insouciante qu’elle avait été. Elle avait absolument tenu à apprendre le combat à l’épée et le tir à l’arc avec ses frères, tandis qu’on inculquait à ses sœurs l’art de la broderie et de la musique. Cela lui avait valu un certain nombre de remontrances, sans pour autant l’empêcher de recommencer.

Enfin, elle arriva à la lisière de la forêt. Ralentissant un peu, Eleanor frissonna. Jamais elle n’avait été aussi loin de ce côté-ci du domaine. On disait les bois hantés et si l’aventure ne lui faisait pas peur, une petite voix au fond d’elle l’avait toujours dissuadée de s’y aventurer. Mais aujourd’hui, elle n’avait plus le choix. Alors, la jeune femme prit une grande inspiration et fit avancer son cheval au pas, franchissant la limite qu’elle s’était jusque-là imposée. La lumière disparut rapidement, laissant place à une ombre menaçante et inquiétante. Les arbres formaient une dense couche de feuillage qui filtrait la lumière et par la même occasion la chaleur. Partout des racines sortaient du sol, rabougries, fourbes, rendant le chemin difficilement praticable. Il fallut près de deux heures au pur-sang et à sa cavalière pour arriver de l’autre côté du bois.

Peu à peu, l’obscure armée de conifères, dont la cime était violemment secouée par un vent soudain qui s’était levé, s’éclaircit pour laisser place à un immense lac gris. En levant la tête, Eleanor s’aperçut que des nuages noirs avaient envahi le ciel, menaçant de déverser des trombes d’eau à tout moment. Le souffle puissant des rafales créait des vaguelettes à la surface de l’eau et une brume fantomatique recouvrait les berges, le lac semblant y faire une trouée inexpliquée. De l’autre côté, squelettique, branlante, trônait une cabane en bois sur pilotis. Ses poutres plantées dans l’eau ressemblaient à des jambes décharnées, rongées par l’usage du temps. La jeune femme resserra les pans de sa cape, chassant les cheveux qui venaient lui tomber dans les yeux et talonna l’équidé pour qu’il l’emmène au petit trot jusqu’à la masure. En faisant le tour du lac, Eleanor tentait de voir ce qui se trouvait au-delà des rives, mais la brume était trop épaisse et ne laissait rien passer.

La vieille maison ne tarda pas à se rapprocher d’eux. Elle remarqua qu’une petite ouverture laissait passer un éclat jaunâtre, seule source de lumière au milieu de tout cet amas de gris et de noir. Tremblant légèrement, Eleanor mit pied à terre et attacha son compagnon au ponton, avant de lui caresser l’encolure :

– N’aie crainte, je reviens vite.

Elle ne sût pas si elle avait cherché à rassurer la bête ou elle-même, mais cela lui donna la force d’emprunter l’enfilade de planches grinçantes qui la menaient jusqu’à la maison, au centre du lac. Plus elle avançait, plus elle se demandait si c’était une bonne idée. Elle avait eu beau retourner le problème dans tous les sens, c’était la seule solution. Arrivée devant la porte, elle remarqua que les planches de bois s’effritaient sous l’effet des caprices des saisons passées, leur teinte grisâtre se fondant dans le paysage ambiant. Les clous encore présents, n’étaient plus que rouille. La jeune femme ferma les yeux. Les rouvrit, leva la main. La porte s’ouvrit.

Devant elle se tenait une femme. Vieille. Très vieille. Son visage ondulait sous de nombreuses rides. Un rictus, qui devait autrefois ressembler à un sourire, déformait ses lèvres. Ses cheveux blancs hirsutes encadraient son visage aux pommettes saillantes. Le bleu glacial de son regard transperça Eleanor, qui eût l’impression que son âme était mise à nu tout d’un coup. Elles restèrent ainsi, l’une face à l’autre, pendant ce qui sembla durer une éternité. Un son grinçant sortit de la gorge de son hôtesse.

– Bonsoir Eleanor. Je t’attendais.

Abasourdie, cette dernière resta coite un moment, alors que, prenant appui sur un long morceau de bois filiforme, la frêle silhouette de la vieille femme s’était écartée pour la laisser entrer. Elle dut baisser la tête pour passer le pas de la porte et se retrouva dans un intérieur rustique. Peu de confort, une paillasse qui devait servir de lit, une cheminée dans laquelle ronflait un feu dont les braises rougeoyaient sous la chaleur intense des flammes. Au-dessus était suspendue une imposante marmite en fonte où bouillonnait un étrange liquide argenté. Quelques ustensiles étaient éparpillés çà et là, et au centre, un tronc qui devait servir de siège. La vieille femme l’attendait. Eleanor terminait de détailler son environnement et son regard s’arrêta sur une ancienne table en bois brut, sur laquelle reposaient toutes sortes de fioles et de flacons aux couleurs effrayantes. Un alambic fumait et, au bout du sinueux chemin de cuivre, s’écoulait, goutte à goutte, un liquide lui aussi grisâtre.

– Je t’écoute.

La voix éraillée fit sursauter la jeune femme qui s’était perdue dans la contemplation de la circulation sans fin du fluide. Elle renonça à lui demander comment elle savait qui elle était. Après tout, cela n’aurait pas dû la surprendre. Eleanor prit une inspiration, hésita et se lança.

– Je…

– Oui ?

– Je souhaiterais ne jamais enfanter.

Un temps de silence plana dans la masure alors que la vieille avait plongé son regard perçant dans celui de la rousse.

– As-tu conscience de ce que tu demandes ?

– Oui.

– Es-tu sûre de ta décision ?

– Oui.

– Quel prix es-tu prête à payer pour cela ?

Eleanor s’arrêta. Réfléchit. Elle renonçait déjà à une part d’elle-même, sa liberté, ce à quoi elle aspirait, en acceptant ce mariage. Elle avait encore l’espoir d’un compromis, d’un espace à elle, pour elle, dans cette union, qui lui permettrait de s’accomplir au moins en partie. Si elle devenait mère, elle finirait par s’enfermer dans un schéma de vie qui mènerait à une véritable extinction d’elle-même. C’était une chose inconcevable pour elle. La maternité était, dans son esprit et dans son cœur, le signe d’un total asservissement à la société et elle avait toujours été libre. La jeune femme répondit, on ne peut plus sûre d’elle :

– Votre prix sera le mien.

La vieille l’observa étrangement pendant un long moment. Eleanor se sentait scrutée dans les moindres parcelles de son âme.

– Bien.

Prenant appui sur son bâton, le corps décharné de l’ancienne se retourna pour farfouiller dans un obscur tiroir. Elle la dévisagea, avant de se concentrer sur l’objet qu’elle tenait mystérieusement entre ses mains, marmonnant dans sa barbe. Eleanor, prise d’un étrange pressentiment, eut envie de partir, partir vite et loin. Mais, secouant la tête, elle chassa cette idée et attendit patiemment. La vieille releva le visage et s’en alla cette fois saisir une des fioles posées sur la table. Comme si elle était déjà prête. Les mots de son interlocutrice lui revinrent en mémoire : « Je t’attendais ». Un frisson lui parcourut l’échine. Tous ses sens en alerte lui hurlaient de partir, de partir, maintenant. Pourtant, elle ne s’était jamais sentie aussi sûre d’elle. Son hôtesse lui tendit le flacon.

– Bois. Voici qui exaucera ton souhait. Tu auras peut-être des douleurs de menstrues dans les jours qui viennent mais rien d’insurmontable et ça devrait s’estomper rapidement.

Eleanor ne posa aucune question. Elle avala sans broncher le contenu de la fiole, dont l’amertume lui arracha tout de même une grimace. Elle avait scellé son sort. Désormais, elle ne pouvait plus revenir en arrière. Jamais. La jeune femme se sentit à la fois soulagée et pleine d’appréhension. Maintenant, elle allait savoir quel prix lui coûtait sa liberté. La vieille tenait dans sa main gauche une chaîne, au bout de laquelle était suspendu un petit sablier. Le sable qu’il contenait semblait venir d’un rivage inconnu tant la teinte blanche respirait la pureté.

– La condition est simple Eleanor, si à la fin du temps écoulé, aucune vie n’a été prise par ta main, ta dette sera payée.

– Et sinon ?

– Tu mourras.

Ces deux mots sonnèrent comme un verdict sans appel. Eleanor déglutit et acquiesça. Si, a priori, ce n’était pas dans ses plans à plus ou moins long terme, une petite voix intérieure lui murmurait, tout au fond d’elle, de prendre garde, que cela ne pouvait pas être aussi simple. Dédaignant cet avertissement, la rousse étouffa ce chuchotement quelque peu dérangeant et attrapa le collier, qu’elle attacha autour de son cou.

– Merci.

La vieille femme hocha doucement la tête et regarda partir son invitée. Au moment de franchir le pas de la porte, Eleanor se retourna et interrogea une dernière fois celle qui venait de lui accorder sa liberté :

– Combien de temps…

– C’est le sablier qui décide, répondit-elle dans un sourire énigmatique.

Et embrassant l’endroit d’un dernier coup d’œil, la jeune femme quitta la cabane qui semblait flotter sur l’eau. Elle rejoignit sa monture qui piaffait d’impatience et toutes deux partirent au galop, pressées d’échapper à l’atmosphère à la fois glaçante et étouffante qui régnait en ces lieux.

Le mariage fut célébré quelques semaines plus tard, au grand soulagement des parents d’Eleanor. Au moment de lui lâcher la main devant l’autel, la jeune femme croisa le regard de son père et elle vit à quel point cela lui coûtait, car il savait quel sacrifice il lui demandait. A ce moment, elle eût envie de le serrer contre elle et de lui dire qu’elle s’était préservée un espace à elle. Mais bien entendu, elle ne pouvait pas. La jeune femme se contenta de lui montrer d’une pression douce que tout irait bien.

La première année se déroula sans aucune ombre au tableau. Eleanor avait remarqué que le sable s’était mis à s’écouler, mais sur un rythme qu’elle ne parvenait pas à définir. Peu importait. Chaque cycle, son soulagement augmentait autant que l’incompréhension de son mari, à l’arrivée de ses menstrues. Eleanor jouissait d’une certaine liberté et mis à part les mondanités imposées par son rang, elle pouvait vaquer à ses occupations comme elle l’entendait. L’aristocrate commençait à trouver son équilibre en tant que maîtresse des lieux et même les domestiques semblaient s’être accoutumés à ses lubies.

Cependant, le caractère de son époux se dégradait et il devint colérique, irascible, commençant à exiger d’elle une posture plus convenable pour une femme dans sa position. Un soir, après le dîner, alors qu’elle lisait à la lumière du feu réconfortant de l’hiver, Eleanor sursauta en voyant se briser contre le linteau de la cheminée, un verre, qui éclata en mille morceaux. Se retournant stupéfaite, elle découvrit son mari, écumant de rage. Il se dirigea vers elle d’un pas décidé, lui attrapa le poignet et la fit se lever sans ménagement.

– Tu me fais mal !

Elle avait crié. C’était la première fois qu’il entrait dans une telle colère et la jeune femme se sentit envahie par une peur sourde et latente.

– Tais toi ! vociféra-t-il. Tais-toi ! Toi, tes bizarreries, ton attitude, vous me faites honte ! Ton incapacité à enfanter me met dans une position impossible et je suis la risée de l’aristocratie !

Il avait bu.

– Maintenant, déshabille-toi.

Le ton employé ne souffrait aucun refus. Hébétée, Eleanor resta sans voix. Elle ne rechignait jamais à accomplir son devoir conjugal, y trouvant même du plaisir, mais ce fut son esprit insoumis qui parla.

– Non.

Une gifle s’abattit sur sa joue. Brutale. Violente.

– J’ai dit maintenant.

La voix était froide, glaciale même.

– Non.

Nouvelle gifle. Eleanor chancela, trébucha et tomba à terre. Son mari se jeta sur elle et arracha ce qui le gênait avant d’ôter ses propres chausses. Alors, mue par un instinct animal, primitif, une volonté féroce de défendre tout ce pour quoi elle s’était battue, tout ce qu’elle avait sacrifié, mue par son besoin vital de rester libre, la jeune femme tâtonna sur le tapis et se saisit du tisonnier.

Et elle frappa. Elle frappa. Encore. Et encore. Dans une rage de vivre, de vivre comme elle l’avait toujours désiré, fidèle à elle-même, à ce qu’elle était, dans sa nature profonde, émancipée des carcans de cette société qui n’avait aucun sens.

Un cri à côté d’eux l’arracha à sa rage aveugle, celui d’un page venu apporter une chandelle. En suivant le regard terrorisé du jeune homme, elle se rendit compte avec horreur que son mari gisait à ses côtés, le crâne fendu, les yeux figés, pleins d’incompréhension, éternels. C’est alors qu’elle baissa le regard et le vit. Le dernier grain de sable, qui venait de tomber. La larme qui coulait de sa joue s’écrasa sur l’objet entre ses mains.

Sous les yeux horrifiés des domestiques, le sablier se mit à briller, transcender, et un son inhumain résonna dans la salle, brisant les carreaux des fenêtres, arrachant des cris de terreur aux témoins du funeste spectacle. Plongée dans une douce torpeur, Eleanor ne se rendit plus compte de rien. Elle l’entendit, ce mot, terrible, murmuré, enfler, gronder :

– Sorcellerie !

***

Le pas lourd et pesant, le visage caché par ses cheveux d’habitude si flamboyants, à présent ternis par la crasse, Eleanor marchait, la tête baissée, vers les derniers moments de sa courte vie. Sur son passage, des huées, des cris, des injures, des crachats. La foule, présente, pressante, oppressante, se faisait plus dense et plus compacte, au fil des minutes qui s’écoulaient à la fois lentement et terriblement vite. En passant devant les premiers rangs, elle croisa le regard de son père, empli de douleur, de tristesse. Elle sentit son cœur se déchirer. Un des spectateurs l’alpagua :

– Sorcière ! Tu vas brûler sale chienne !

Des larmes brûlantes coulaient sur ses joues tachetées. Elle ne voulait pas. Elle n’avait pas le choix. Le bûcher était là. Il l’attendait. Implacable. Eleanor monta, résignée, se laissa attacher sans résistance. Elle posa ses yeux verts éclatant sur l’assemblée, qui se tut d’un coup. Une étincelle jaillit. Un éclat de rire incontrôlable s’échappa de sa poitrine et immobilisa tous ceux qui assistaient au spectacle. Les flammes ronflantes commencèrent à lui lécher les orteils, avant de se propager sans vergogne à son corps. La douleur devint insupportable, insoutenable et son rire se mua en cri perçant, glaçant, qui fit saigner les oreilles de chaque personne présente sur la place. Puis ce fut le noir.

Sur le lac, une silhouette spectrale semblait flotter sur l’eau, en direction de la maison sur pilotis. A l’intérieur, la vieille femme hurlait d’un rire sardonique, en écho au dernier cri d’Eleanor, les paupières closes. Se redressant, elle s’étira de tous ses membres et rouvrit les yeux, debout devant le miroir posté devant elle. Une masse de boucles rousses indisciplinées. Des yeux d’un éclat émeraude. Le nez constellé de tâches de rousseurs. La peau blanche, presque laiteuse. Un sourire étira les lèvres de ce visage qu’elle redécouvrait. Enfin. Elle était libre.